Le cadre dirigeant : un salarié pas comme les autres…
Qui peut être qualifié de « cadre dirigeant » ?
Avant de qualifier un salarié de cadre dirigeant, le premier réflexe est de s’assurer qu’il remplit les conditions posées par le code du travail :
- avoir des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps,
- être habilité à prendre des décisions de façon largement autonome
- percevoir une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.
Même si ces trois critères doivent être cumulatifs (Cass. Soc. 13 janv. 2009, n°06-46208), encore faut-il que le salarié participe effectivement à la direction de l’entreprise (Cass. Soc. 31 janv. 2012, n°10-23828)! Et pour vérifier si le salarié participe effectivement à la direction de l’entreprise, il faut se pencher sur la fonction réellement occupée par le salarié au regard de chacun des trois critères précités.
Prenons quelques exemples :
- un salarié qui est tenu d’être présent au siège de l’entreprise aux heures de présence des autres salariés ne jouit pas d’une réelle autonomie dans son emploi du temps et ne peut donc avoir la qualité de cadre dirigeant (Cass. Soc. 3 fév. 2021, n°18-20812)
- un salarié qui, bien qu’il exerce des fonctions impliquant une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps et qu’il perçoive la rémunération la plus élevée de l’entreprise, ne peut être considéré comme participant à la direction de l’entreprise dès lors qu’il ne dispose que d’une certaine autonomie dans l’exercice de ses missions opérationnelles de directeur, les décisions stratégiques étant prises par le conseil d’administration de la société mère, actionnaire unique (Cass. Soc. 19 juin 2019, n°18-11083)
- En revanche, un directeur d’établissement qui perçoit une rémunération parmi les plus élevées de l’entreprise, dispose d’une grande liberté dans l’organisation de son emploi du temps, bénéfice d’une délégation de pouvoir en matière de respect de la réglementation économique générale et de celle du travail, peut embaucher et licencier le personnel sous sa direction est bien un cadre dirigeant. Mais attention, tout directeur d’établissement n’est pas nécessairement un cadre dirigeant!
Bref, vous l’aurez compris, ce statut n’est pas des plus simples à appréhender et est d’ailleurs source de nombreux contentieux.
Mais alors pourquoi songer à qualifier son salarié de « cadre dirigeant » ?
Quelles sont les particularités du « cadre dirigeant » ?
Souvent présenté comme « valorisant », le statut de cadre dirigeant exclut surtout le salarié de certaines règles protectrices du code du travail.
En effet, il ne sera pas fait application des dispositions relatives à la durée et à l’aménagement du temps de travail, ni aux repos ou aux jours fériés et cela est parfaitement compréhensible au regard des fonctions et responsabilités exercées par le cadre dirigeant.
Ainsi, le cadre dirigeant n’est pas soumis à la durée légale du travail et ne bénéficie donc pas de la règlementation relative aux heures supplémentaires. Il n’est pas non plus tenu de respecter une durée maximum quotidienne ou hebdomadaire de travail. Pas de temps minimum de repos journalier ou hebdomadaire non plus, ni de jours fériés !
Le cadre dirigeant peut travailler quand il veut et autant qu’il veut… ou que ses fonctions l’exigent.
En revanche, de par son statut de salarié, le cadre dirigeant a tout de même droit au bénéfice de ses congés payés et des autres congés légaux ou conventionnels. Il reste également soumis aux règles relatives au respect des conditions d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise, est éligible au compte épargne-temps, …
Récemment, le conseil constitutionnel a également considéré que les salariés susceptibles d’être assimilés à l’employeur (et donc les cadres dirigeants) ne peuvent être privés de la qualité d’électeur aux élections professionnelles et de toute représentation au comité social et économique (Conseil constitutionnel décision n°2021-947 QPC du 19 nov. 2021).
Quels risques encourus en cas d’erreur de qualification ?
Une fois le contrat de travail rompu, l’ex-salarié peut être tenté de contester la qualification de cadre dirigeant qui lui avait été attribuée. Cette contestation peut bien entendu intervenir au cours de l’exécution du contrat mais les contentieux les plus nombreux concernent d’anciens salariés.
Dans cette hypothèse, les conséquences pour l’employeur peuvent être catastrophiques !
En effet, en cas de contentieux, il appartiendra aux tribunaux de se pencher sur les fonctions réellement exercées par le salarié, Quelle que soit la façon dont le contrat de travail ou la fiche de poste sont libellés.
Et s’il apparait que le salarié ne satisfait pas à l’ensemble des critères définis ci-dessus, le juge considèrera que la qualification de cadre dirigeant ne peut être reconnue au salarié. Et comme la reconnaissance de ce statut est exclusive de bon nombre de règles protectrices du code du travail, l’appréciation des critères d’éligibilité au statut est stricte.
Si les tribunaux considèrent que le salarié ne peut relever du statut de cadre dirigeant, ce dernier doit alors être considéré comme soumis au droit commun de la législation sur le temps de travail. Dès lors, il peut obtenir divers rappels de salaires et indemnités (heures supplémentaires, non-respect de la durée maximale de travail ou de la durée de repos), ces rappels couvrant une période de trois années.
En outre, si le salarié parvenait à démontrer la volonté délibérée de l’employeur de contourner les règles protectrices du code du travail en utilisant le statut de cadre dirigeant alors qu’il savait ce dernier inapproprié, le salarié sera recevable à invoquer le délit de « travail dissimulé » afin de bénéficier d’une indemnité équivalente à six mois de salaire.
C’est pourquoi, lorsque la poursuite de la relation contractuelle avec un cadre dirigeant est entravée par divers éléments de contestation dont l’éligibilité au statut, il est souvent préférable de trouver une issue amiable via une transaction.
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